Chaque individu peut rattacher un souvenir, une expérience personnelle au mot « honte ». Mais elle peut également s’envisager autrement que par ce sentiment individuel et passager que l’on éprouve lors d’un instant défini. Nous pourrions aussi la voir comme un motif collectif et répétitif, sous-jacent mais toujours présent, qui infuse nos quotidiens et nos pratiques, figeant nos identités et restreignant nos possibilités.
Pourquoi travailler la honte ?
Dans l’introduction de son essai « Les sources de la honte », le philosophe Vincent de Gaulejac fait part des questionnements présents au début de sa recherche sur la honte : « […] d’où peut bien provenir cet intérêt pour un sentiment que l’on recherche d’abord à dissimuler ? Pourquoi chercher ainsi à dévoiler ce qui fait mal ? ».
La réponse qu’il livre quelques lignes plus tard exprime parfaitement les multiples intérêts qu’une telle recherche soulève : « […] l’intérêt scientifique d’éclairer un phénomène peu étudié ; l’intérêt thérapeutique d’aider des personnes habitées par la honte ; l’intérêt idéologique de dénoncer les effets de domination que produisent l’humiliation, l’invalidation et l’exclusion ; l’intérêt politique de mettre en exergue un phénomène souvent sous-estimé par ceux qui ont la charge d’élaborer de mettre en œuvre les politiques sociales ; l’intérêt de tester l’approche clinique en sociologie sur un thème particulièrement approprié au croisement du psychique et du social… »
La place prépondérante qu’occupe le corps dans la danse contemporaine la désigne comme un outil plus que pertinent pour étudier ces différents champs que recouvre la honte. Parler de honte depuis notre pratique artistique, c’est parler de sa manière de construire des corps et de définir des parcours de vie. C’est aussi l’opportunité de venir bousculer les notions de « talent », de « mérite » et « d’inné » avec celle de déterminisme social (théorisée notamment par le sociologue Pierre Bourdieu).
Comment travailler la honte ?
Cette pièce est envisagée comme une traversée analytique et poétique du processus d’intériorisation de la honte. De son déploiement dans l’être et de l’empreinte qu’elle y laisse. De la façon dont elle taille les gestes. Des espaces qu’elle nous empêche d’occuper. De la place qu’elle nous assigne et de celles qu’elle nous retient d’envisager.
Sans aller dans la théâtralité, l’enjeu artistique est d’amener les interprètes à éprouver les sensations physiques liées à la honte. Les recherches tendront à explorer une corporalité rigide, l’hyper-vigilance, la notion de "corps tendu", ainsi que celle, très littérale, du repli sur soi. Le regard tiendra une place centrale dans l’écriture. La nature du sujet exploré appelle à développer une véritable dramaturgie des regards et à en restituer leurs subtilités.
Que ce soit au niveau de la musique ou des corps, les silences seront eux aussi des éléments clés dans la pièce. Travailler avec eux, c’est amener les notions de "tabou" et "d’indicible", capitales afin de saisir la puissance de la honte à une échelle sociétale. Briser le silence, c’est commencer à renverser la honte.
La présence de trois interprètes au plateau se justifie par la volonté d’engranger et montrer les dynamiques collectives à l’œuvre dans les questionnements soulevés : comment "les autres" peuvent-iels faire émerger et grandir un sentiment de honte en nous ? Comment ce dernier construit-il nos corps, et ce faisant, nos rapports au monde ? Le trio semble être l’outil adapté afin d’accéder à la complexité de ces mécanismes. Ce choix est un moyen d’éviter une relation binaire comme celle qu’offrirait un duo où une dynamique bourreau et victime pourrait vite être instaurée.
Alexandre Goyer
Après avoir été formé CRR d’Angers puis au Ballet Junior de Genève, Alexandre obtient son premier contrat professionnel en 2018 au sein de la compagnie Dantzaz, dans le Pays Basque espagnol.
En 2019 il travaille avec Hannah Ma, basée entre Luxembourg et Trèves (Allemagne) et Sylvain Groud, au Ballet du Nord – CCN de Roubaix pour les créations Adolescent (2019) et 4m2 (2020). Ces pièces lui offrent de multiples occasions de prendre part à des actions pédagogiques à destination de différents publics. En juillet 2021, il participe aux performances in situ Bodies in Urban Spaces avec la compagnie autrichienne Willi Dorner. À l’été 2022 il prend part à la création de la performance FLASH! au festival d’Avignon, projet porté par Yvann Alexandre et chorégraphié par ce dernier en collaboration avec Loïc Touzé, Ambra Senatore et Sylvain Groud.
Sa première pièce, Auditionneur.euses ?, portée par sa compagnie Second Cast (basée à Lyon) voit le jour en 2023.
Sur la saison 2022/23, Alexandre est artiste en Expérimentation au CN D de Lyon et artiste en compagnonnage au CDCN de Roubaix – le Gymnase. Depuis 2023, Alexandre est artiste accompagné par Danse Dense. En 2023, il prend part aux recherches menées par Stéphane Gornikowski (Vaguement compétitifs) dans le cadre de la recherche-action REACT, notamment en poursuivant sa réflexion sur les auditions.
Démo : jeudi 26 juin 2025 à 19h30
Gratuit sur réservation : adriana.falcone@ccnr.fr
→ Alexandre Goyer conduira un atelier Sentir La Fibre lundi 23 juin 2025.
Premières : novembre 2025, Le Croiseur – Scène découverte à Lyon + Festival Danse Dense à Paris
Concept & Chorégraphie : Alexandre Goyer
Interprètes : Mélen Cazenave, Naomi Charlot, Pierre Chauvin-Brunet
Création sonore : Pierre Chauvin-Brunet
Création lumière : Sandrine Sitter
Coproductions : Maison de la Danse de Lyon / programme Transformations ; 2angles ; Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-Pape, direction Yuval Pick / dispositif Matières Premières ; Les SUBS, Lyon (en cours)
Soutiens : Scène Découverte Danse de la Ville de Lyon ; Laboratoire Chorégraphique de Reims ; Danse Dense (dont Alexandre Goyer fait partie des Artistes Accompagnés).
Photo © Fabien Jouanne
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